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Sur le chemin du retour : réussir sa reprise – Part. I

Environ 2000 mots - Temps de lecture estimé : 10 minutes.

Dans notre précédent article nous avons abordé les mécanismes potentiels de la mémoire musculaire qui permettent à un athlète de retrouver ses performances plus rapidement qu’il ne lui en a fallu pour les atteindre initialement. Toujours est-il que pour mettre à profit cette capacité, il est important de planifier sa reprise. La phase de retour à l’entraînement exige d’en cerner les enjeux et d’en éviter les pièges. C’est ce que nous allons voir dans cette première partie.

Points clés

▪ La reprise de l’entraînement après un arrêt prolongé est une période charnière qui doit permettre un retour durable dans la pratique sportive.

▪ Le motif et la durée de l’arrêt vont déterminer les enjeux de la reprise et les éléments clés à prendre en considération dans la planification de l’entraînement.

▪ La stratégie mise en place devra rester flexible et s’adapter à l’évolution des performances, de la fatigue et des problématiques qui pourraient émerger.

▪ Il conviendra d’éviter les approches trop extrêmes comme celles prévoyant un retour trop rapide au rythme d’entraînement antérieur à l’arrêt ou celles qui s’avèrent, au contraire, trop limitantes.

▪ Nous recommandons à l’athlète d’aborder cette phase comme une période de progression à part entière en acceptant son niveau actuel, son nouveau statut et ses nouvelles conditions d’entraînement.

Les enjeux de la reprise

Ils vont être, en premier lieu, déterminés par le motif et la durée de la période d’arrêt. Dans cet article, nous traiterons exclusivement des périodes de désentraînement suite à un arrêt prolongé supérieur à 2-3 semaines. Les arrêts plus courts correspondent généralement à des petits épisodes de maladie ou à des contraintes momentanées (obligations professionnelles, congés sans accès à un équipement adapté). Ces cas de figure ne sont pas à ignorer mais peuvent être pris en charge simplement en limitant au maximum la période d’arrêt, en essayant d’intégrer des séances moins spécifiques ou au poids de corps selon les possibilités et en planifiant une remontée progressive de la charge d’entraînement sur quelques jours lors de la reprise.

Figure 1. Schématisation du processus de reprise de l’entraînement après une période d’arrêt prolongé.

L’arrêt : pourquoi et combien de temps ?

On pourrait distinguer trois motifs d’arrêt prolongé : l’impossibilité de s’entraîner à cause de contraintes temporaires (matérielles, temporelles etc.), la blessure invalidante liée ou non à l’entraînement et enfin la démotivation. Ces trois facteurs ne sont pas mutuellement exclusifs et peuvent se cumuler. Par exemple, une dégradation des conditions d’entraînement peut entraîner une démotivation. Une blessure invalidante peut pousser à l’arrêt complet de l’entraînement alors qu’elle n’est pas handicapante sur certains mouvements. Ceci nous amène à notre premier conseil : Ne vous arrêtez pas ! Jamais et sous aucun prétexte ! Blague à part, nous vous recommandons de faire votre possible pour conserver un rythme d’entraînement, même faible et très adapté. On est souvent tenté de s’imaginer que parce qu’on ne peut pas être à 100%, faire les 25% ou 50% à notre portée ne sert à rien. Grave erreur… Si toutefois il est trop tard, voici nos recommandations.

Déterminer ses objectifs

Avant de reprendre il est important de faire le point sur vos objectifs. Où en est votre relation avec le sport ? L’évolution de votre rythme de vie et de vos objectifs extra-sportifs ou une blessure perçue comme grave peuvent avoir affecté la vision de votre futur dans le sport. Cette démarche est d’autant plus importante si l’arrêt a été causé par une perte de motivation. Il est essentiel d’en déterminer les causes (rythme d’entraînement trop soutenu, absence de progression, attentes trop élevées de résultats immédiats, sources de motivation extrinsèques perdues). Si vous êtes sur le chemin du retour, c’est que la motivation a repris le dessus mais faire le point sur votre état d’esprit et vos attentes vous aidera à ne pas basculer dans un nouveau cycle de démotivation. Qu’allez-vous mettre en place pour éviter que cela se reproduise ? 

De façon plus terre à terre, quels sont vos objectifs en tant qu’athlète ? Voulez-vous rapidement participer à une compétition ? Avec des minimas ou un titre à la clé ? Ou êtes-vous déconnectés des aspects compétitifs ? Au moins pour le moment peut-être ? Vous prévoyez de laisser le temps aux choses de se remettre en place ?

Quels que soient vos objectifs à court et à plus long terme, il est important de les mettre au clair au moment de votre reprise, avec votre coach le cas échéant. Ils seront adaptés au motif de l’arrêt et pourront être une source de motivation ou au contraire de retenue, de façon à vous placer dans le meilleur état d’esprit pour assurer un retour durable dans la pratique. Enfin, ils conditionneront les stratégies de planification à mettre en place.

Retrouver ses repères

L’arrêt prolongé va s’accompagner d’un déconditionnement physique, technique et mental. Bien que les projecteurs soient braqués sur le retour des performances, vous allez devoir également retrouver vos repères techniques et psychologiques autour de l’entraînement. Ce processus se fait naturellement la plupart du temps. Si l’arrêt a été long et que vos conditions de vie et d’entraînement sont très différentes de celles que vous avez connues avant votre arrêt, il ne faut pas sous-estimer le temps qu’il vous faudra pour vous sentir parfaitement à l’aise dans ce nouvel environnement et accepter cette période d’inconfort. 

Si l’arrêt a été court (quelques semaines) et que vous aviez un rythme d’entraînement soutenu auparavant, votre technique vous paraîtra probablement brouillonne et peu reproductible au cours des premières séances. A moins, que la persistance d’une douleur ne vous force à modifier significativement vos mouvements, il est préférable de conserver vos repères techniques et les automatismes devraient revenir au bout de quelques séances. Si vous reprenez après plusieurs mois d’arrêts, vos repères techniques seront probablement bien loin derrière vous et il faudra être d’autant plus attentifs à ces aspects. Il sera peut-être utile de visionner vos anciennes vidéos pour reproduire les mêmes placements et peut-être réintroduire certaines cues pour retrouver une technique efficace. Il faudra surveiller le respect des standards de compétition (s’ils sont importants pour vos objectifs) et se filmer régulièrement si ce n’est pas déjà dans vos habitudes. Cette période de réadaptation technique sera probablement assez courte et gratifiante si aucune douleur (persistante ou nouvelle) ne vient gâcher la fête.

Retrouver une charge de travail raisonnable et ses performances

Évidemment, au moment de la reprise, votre principale préoccupation sera de retrouver rapidement un niveau de performances équivalent à ce dont vous étiez capable avant votre arrêt. Cet objectif peut s’accompagner d’anxiété et les résultats que vous obtiendrez dans les premières semaines peuvent fortement impacter votre motivation. Pour autant, il ne fait aucun doute qu’avec une programmation progressive et cohérente l’objectif sera atteint. Pour ce faire il vous faudra retrouver progressivement une charge d’entraînement raisonnable, c’est-à-dire suffisante pour recréer les adaptations perdues mais pas ambitieuse au point de déclencher une fatigue trop importante et l’apparition de douleurs qui pourraient mettre en danger votre motivation et votre retour durable dans la pratique. La charge d’entraînement peut-être définie comme l’ensemble des contraintes physiques et psychologiques que vous imposez à votre organisme. C’est la quantité ou dose d’entraînement que vous réalisez dans une unité de temps donné. On parle également de stress. Cette « prudence » vis-à-vis de la charge d’entraînement sera d’autant plus importante si l’arrêt fait suite à une blessure. Il faudra porter une attention particulière au stress imposé sur la zone concernée. Toutefois cette approche méthodique et progressive sera de mise dans tous les cas. Plus la période d’arrêt sera longue, plus il faudra vous attendre à ce que cette phase prenne du temps. Si votre approche est cohérente et que vous évitez les pièges de cette période, il est probable que vous reveniez à votre niveau plus rapidement que ce à quoi vous vous attendiez.

Les pièges de la reprise

Vouloir retrouver ses anciennes performances trop rapidement

Si retrouver vos performances est l’objectif majeur de la reprise, se précipiter ralentira probablement le processus. Forcer la remontée des charges, si celles-ci ne respectent pas les consignes de votre programmation (et notamment si vous utilisez le RPE) génèrera une fatigue plus importante que prévue, qui excédera peut-être vos capacités de récupération et ralentira votre progression. De plus, ces performances « forcées » seront parfois réalisées au détriment de la qualité de l’exécution du mouvement (des standards de compétition ou de vos standards habituels). Selon la durée de l’arrêt, vous aurez perdu tout ou partie des adaptations que vous aviez obtenues lors de votre phase d’entraînement initiale (adaptations musculo-tendineuses, neuronales, cardiovasculaires etc.). Nous vous conseillons donc de ne pas vous comparer à votre « moi » du passé et de repartir en tenant compte de vos capacités actuelles. En somme, il est important de considérer cette étape comme une phase de progression à part entière. Cet état d’esprit vous permettra de limiter la frustration et de prendre les bonnes décisions au moment de planifier votre entraînement et de sélectionner les charges au cours de votre séance.

Vouloir reproduire son ancienne charge d’entraînement

Un raisonnement assez fréquent et qui paraît cohérent à priori est de considérer que si vous avez dû vous imposer une charge d’entraînement précise pour aboutir à une performance donnée, il vous faudra la reproduire afin de retrouver ce niveau. Cependant, s’il est possible qu’il soit bénéfique à terme d’y revenir, il est certain que le processus doit être graduel. Vos conditions de récupération ont pu évoluer entre ces deux phases d’entraînement, et vos méthodes de planification également. Prenez en compte ces changements et considérez vous à votre niveau actuel. Dans les premières semaines de la reprise, une charge d’entraînement faible à modérée sera probablement suffisante pour réaugmenter vos performances. Conservez une marge en termes de récupération, monitorez la fatigue et l’avancée des charges et n’augmentez la dose d’entraînement que si cela vous paraît nécessaire (si vous atteignez une phase de stagnation par exemple). Vous devriez retrouver assez rapidement une capacité de travail correcte et vos performances reviendront peut-être plus vite que prévu. Cela vous laissera le temps de retrouver vos repères et vous permettra d’éviter une phase de fatigue intense et l’apparition de douleurs qui compliqueraient votre retour.

Prendre trop de précautions

S’il est prudent de planifier une progressivité dans la remontée des charges et de la dose d’entraînement, il peut être tout aussi contreproductif de trop se limiter. Se fixer de trop faibles incréments de charges hebdomadaires, ou s’interdire de les augmenter pendant une durée établie peut-être un frein majeur dans votre retour à votre meilleur niveau. Ces précautions excessives sont souvent mises en place lors de la reprise suite à une blessure. Bien évidemment, si une douleur persiste, il conviendra d’agir en conséquence. Mais même dans ce cas de figure, si des progrès significatifs peuvent être effectués d’une semaine à l’autre, sans faire resurgir ou aggraver les symptômes, mieux vaut ne pas s’en priver. Comme la progression en temps normal, celle lors de votre reprise n’a pas vocation à être linéaire, et trop la contraindre ne garantit pas que vous n’allez pas vous heurter à certains paliers plus tard. Nous vous déconseillons une approche extrême, qu’elle soit trop ambitieuse ou trop prudente. Prenez les progrès lorsqu’ils s’offrent à vous et soyez patients lorsqu’ils se refusent. L’idée centrale ici est de suivre vos adaptations au fil des semaines et de leur emboîter le pas. Suivre la fatigue et ajuster la charge d’entraînement vous permettra de passer ce cap.

Figure 2. Exemple de pièges pouvant nuire à la reprise et au retour des performances de l’athlète.

Finalement, si ces conseils sont respectés, plusieurs stratégies de planification vous permettront d’arriver à vos fins. Dans une seconde partie, nous reviendrons sur l’importance du motif et de la durée de l’arrêt dans l’organisation de la reprise. Nous vous proposerons plusieurs schémas de progression afin de vous aiguiller dans le retour à votre meilleur niveau.

À propos de l’auteur

Benjamin Lair

Benjamin Lair

Benjamin est titulaire d’un Master d’Optimisation de la Performance Sportive obtenu à l’Université Toulouse III – Paul Sabatier en 2019. Il est actuellement doctorant au sein de l’INSERM où il travaille notamment sur la physiologie du tissu musculaire. Il pratique la force athlétique depuis 2016 et a participé à de nombreuses compétitions.

Si vous avez une question concernant notre article, n’hésitez pas à nous en faire part via notre formulaire de contact.

À propos de l’auteur

Benjamin Lair

Benjamin Lair

Benjamin est titulaire d’un Master d’Optimisation de la Performance Sportive obtenu à l’Université Toulouse III – Paul Sabatier en 2019. Il est actuellement doctorant au sein de l’INSERM où il travaille notamment sur la physiologie du tissu musculaire. Il pratique la force athlétique depuis 2016 et a participé à de nombreuses compétitions.

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